Février
Le 30 février serait un beau jour.
En l'état actuel des choses et du calendrier, le 30 février n'existe pas.
Février file, s'esquive, glisse entre les doigts du temps;
un 29 intermittent, pas de 30, encore moins de 31;
c'est ni fait ni à faire, approximatif et bâclé, ça finit en queue de poisson.
A peine y a-t-on pensé
que février est passé, trépassé, fichu, enfui, emballé, pesé.
On ne le regrette pas forcément.
Février sent trop le vieil hiver, le sempiternel potage et le bottillon fourré;
les rhûmes s'y éternisent, ça tousse, on se mouche, on n'est pas solide.
Février est austère,
un peu grognon, vaguement ronchon,
pas franchement exalté ni totalement dynamique.
Février n'adhère pas,
il est enchifrené, il pince la bouche et
serre les fesses et fait tapisserie au bal des jours heureux.
La St Valentin ne suffit pas à l'emballer,
la St Valentin ne fait pas le poids, trop légère et court vétue,
la St Valentin,
trop rose, trop fugace, trop sucrée, fabriquée, frelatée, chantournée,
montée en épingle et gonflée à l'hélium.
Février ne croit pas à la St Valentin, il fait semblant,
il y va du bout des dents, il laisse rouler, il attend que ça passe.
Marie Hélène Lafon
(Extrait d'une chronique du journal local d'ici)